
Rexel accélère sa transformation digitale pour renforcer l’innovation et la collaboration avec ses fournisseurs. Structuration de la donnée, outils d’analyse et IA deviennent des leviers clés pour mieux comprendre les besoins clients. L’éclairage d’Antoine Audureau, Group Chief Procurement Officer chez Rexel.
INNOVATION B2B : Pouvez-vous rappeler en quelques mots la place de Rexel sur le marché mondial et les principaux chiffres qui caractérisent votre activité ?
Antoine Audureau : Rexel est le numéro deux mondial de la distribution de produits et solutions électriques. Nous opérons dans 19 pays, avec deux grandes zones qui représentent 95 % de notre chiffre d’affaires : l’Amérique du Nord et l’Europe. L’entreprise compte environ 28 000 collaborateurs.
Nous ne sommes pas un « pure player » du digital : notre modèle est véritablement omnicanal, avec des agences physiques, des commerciaux et des experts terrain. Rexel collabore avec plus de 5 000 fournisseurs à travers le monde.
Quels leviers digitaux transforment aujourd’hui le plus profondément la fonction achats chez Rexel (IA, automatisation, plateformes collaboratives…) ?
Lorsqu’on parle de leviers digitaux, tout le monde pense immédiatement à l’intelligence artificielle. Mais avant l’IA, il y a la donnée. La première étape a été de structurer et d’exploiter nos données : création de data lakes au niveau du groupe et des pays, regroupant par exemple toute notre facturation. Cela nous permet d’analyser les comportements de nos clients et d’en tirer des enseignements concrets.
La différence entre le B2C et le B2B est importante : dans le B2C, les grands industriels maîtrisent déjà l’analyse de données ; dans le B2B, ce n’est pas toujours le cas. Notre rôle, chez Rexel, n’est donc pas seulement de partager les données avec nos fournisseurs, mais de la rendre intelligible, exploitable et utile. Nous mettons à leur disposition des outils d’analyse leur permettant d’en tirer des actions concrètes. C’est relativement nouveau dans le monde du B2B, et tout à fait inédit dans le secteur industriel de l’électricité. L’IA intervient ensuite pour rendre ces analyses plus rapides, plus réactives et plus puissantes, tout en gardant un contrôle humain.
Nous avons aussi orienté nos outils digitaux selon deux grandes « focales ». Tout d’abord, la durabilité : nos solutions permettent à nos clients d’évaluer leur empreinte carbone en fonction de leurs choix d’achat. Nous lancerons début 2026 un observatoire des comportements durables, afin d’aider nos partenaires à orienter leurs investissements. D’ailleurs, l’offre durable croît aujourd’hui 5 à 10 points plus vite que l’offre standard, et encore plus sur le canal digital.
Autre grande focale : l’innovation. Le marché de l’électricité évolue très vite, porté par la transition énergétique et les nouvelles réglementations. Nous collaborons étroitement avec nos fournisseurs dès les phases amont de leurs projets d’innovation, jusqu’au lancement et au suivi des produits, en nous appuyant sur des retours clients en temps réel. Sans le digital, ce niveau d’agilité serait impossible.
Comment collaborez-vous avec des startups ou des fournisseurs innovants pour stimuler la performance et la durabilité de la chaîne d’approvisionnement ?
Nos achats fonctionnent sur deux dimensions : l’innovation et la chaîne d’approvisionnement. Sur cette dernière, nous partageons davantage d’informations en amont pour fluidifier les échanges avec nos fournisseurs et améliorer la disponibilité des produits pour nos clients. Par exemple, nous travaillons avec Schneider pour intégrer leurs stocks à nos propres prévisions, afin d’offrir une meilleure visibilité aux clients. Cela suppose un vrai travail de confiance et de transparence.
Côté innovation, nous collaborons surtout avec les grands acteurs du secteur plutôt qu’avec des startups, car notre modèle exige une mise à l’échelle rapide. Avec nos partenaires (Schneider, Legrand, Siemens…), nous avons mis en place un cycle d’innovation structuré, avec des moments clés d’échange sous confidentialité.
Nous partageons les informations en amont, définissons ensemble les priorités, et suivons les résultats avec des indicateurs précis (KPIs). C’est un modèle d’innovation partagée et mesurable, rendu possible par les outils digitaux.
Comment accompagnez-vous la montée en compétences de vos équipes pour qu’elles deviennent des acteurs de l’innovation, pas seulement des acheteurs ?
La digitalisation a aussi transformé la formation. Nous avons déployé une plateforme d’apprentissage en ligne, Skill Up, qui permet non seulement de former nos forces de vente, mais aussi de mesurer et faire progresser leur niveau d’expertise, du niveau 1 au niveau 3 selon les besoins et les marchés. Cela nous aide à orienter les compétences vers les sujets prioritaires : efficacité énergétique, électrification, cybersécurité industrielle…
Cette montée en compétence est à la fois vitale et demandée. Vitale, car nous sommes passés d’un modèle de distributeur généraliste à un multispécialiste de l’électrification. Demandée aussi par nos fournisseurs, qui souhaitent que nos équipes soient capables de relayer leurs innovations et de parler le même langage technique qu’eux. Certains, comme Schneider ou Siemens, vont même jusqu’à certifier nos équipes en fonction de leur niveau d’expertise.
Rexel interviendra lors de la conférence Innovation B2B 2025 le 11 décembre à Paris.
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